Un seul mot...
Mais pourquoi faut-il qu’on ne puisse pas compter sur les objets ?
Un ex prétendait qu’en tant que femme j’étais plus à même de
comprendre les machines. Il voulait parler de la machine à laver et du
fer à repasser… Quel gros lourd…
Et maintenant, je suis en train de
me faire larguer au téléphone en pleine rue par un lâche et c’est la
panne de batterie. J’ai juste le temps de lui donner le numéro de la
cabine téléphonique. Je me retrouve donc coincée dans cette petite
boite en train d’écouter des reproches, des excuses, tous plus bidons
les uns que les autres… Et comme je suis enfermée, j’ai l’impression
d’être seule. Alors, je pleure, je crie…
Je crois que les gens qui passent sur le trottoir à 50 centimètres de moi ne voient ni n’entendent rien…
A travers les larmes, je remarque un homme qui ralentit à l’approche de la cabine. Il s’arrête et me regarde franchement à travers la vitre. Il voit mes larmes, mes yeux rouges, toute la détresse. Il entend sans doute suffisamment de choses pour comprendre la situation…
Alors il ouvre la porte de la cabine, met un doigt sur sa bouche autant pour me dire de me taire que pour me faire comprendre qu’il ne dira pas un mot. Il me prend très délicatement le combiné de la main et le repose sans violence sur la fourche de l’appareil coupant la communication. Il fouille dans ses poches, en sort un mouchoir, essuie mes larmes. Il prend mon sac posé sur la tablette, met son bras autour de mes épaules. Il me regarde avec bienveillance. Je pose ma tête sur sa poitrine, juste un instant. J’ai envie qu’il me protège.
Il me prend la main, nous marchons un peu. Il ne dit toujours pas un mot. Je ne sais pas très bien vers où il m’emmène mais la chaleur de sa main me rassure. Arrivés devant un immeuble, il tape le code, nous montons quelques étages, il ouvre une porte. Nous entrons dans un appartement.
Au milieu du salon, il me sert très fort dans ses bras. Je sens son désir qui répond au mien. Il m’attire, toujours sans un mot, dans la chambre. Il m’assoie sur le bord du lit, m’embrasse à plein bouche, me caresse le corps. Je me laisse faire totalement. Sa douceur me rassure, m’apaise. Il me déshabille lentement, très respectueusement.
Et il me fait l’amour.
Il me caresse encore, et, épuisée par toutes ces émotions, je m’endors.
Je me réveille le lendemain. Il a eu la délicatesse de me couvrir pendant la nuit. Au froissement des draps, je devine qu’il a dormi à mes cotés, sans me réveiller. Je me lève et parcours l’appartement. Dans la petite cuisine une pendule m’indique qu’il est 10 heures. Sur la table, il y a un bol propre, du café à réchauffer au micro-ondes, des madeleines, de la brioche et un verre de jus d’orange. Je m’assoie à la table et déguste lentement. J'ai faim ; je n'ai pas dîné la veille, m'étant endormie comme une masse. Jamais un petit déjeuné seule ne m’a paru aussi bon. Je déguste autant le café que ce plaisir coupable de ne pas être au travail et de n’avoir prévenu personne… Il y a bien quelques pensées tristes pour l’homme qui me quitte, mais l’univers de cet inconnu me paraît doux et semble me protéger.
Dans la salle de bain, un drap de bain propre en évidence. Je me douche lentement. Je m’habille, rassemble mes affaires.
J’avise un petit bloc de papier. Je n’écris qu’un seul mot : Merci, le pose sur la table basse du salon. Je pars en claquant la porte derrière moi.
Je suis sereine. Pas joyeuse, mais apaisée.